Rencontre avec Gabriel Mangematin

Ancien vétérinaire, ce passionné de vin signe Quand Pinot noir… rime avec Terroir chez Inspir’Éditions. Une ode à ce cépage emblématique de la Bourgogne, adopté depuis par d’autres régions et même pays. 

Comment vous est venue l’envie d’écrire cet ouvrage ?

Si j’ai exercé le métier de vétérinaire pendant des dizaines d’années, tout près de Beaune notamment, avant de m’installer en Vendée, j’ai toujours été intéressé par le vin. Surtout, par celles et ceux qui le font. Au point de me rendre encore aujourd’hui en Bourgogne, deux fois par an, afin d’aller à leur rencontre. Au gré de ces échanges, des notes prises, l’idée de leur consacrer un livre m’est apparue. Un fil rouge s’est très vite imposé : le pinot noir.

Un cépage taillé pour la Bourgogne…

Assurément ! À moins que ce ne soit l’inverse ! Toujours est-il que là, plus qu’ailleurs, les hommes, le climat, la géographie… ont nourri l’histoire du pinot noir. Et ce, dès 1098, après que l’Abbaye de Cîteaux ait été fondée, dans la plaine de Saône, au cœur de la Bourgogne. Je n’insisterai jamais assez sur la contribution décisive des moines en général, et des cisterciens en particulier, à l’essor du pinot noir en France et donc au-delà…

Comment expliquez-vous un tel succès ?

J’aime à décrire le pinot noir comme un lecteur de terroir. Certains vignerons parlent de leur côté de traducteur ou de passeur. Contrairement à d’autres cépages, il ne marque par les vins. Bien au contraire, il témoigne d’une véritable capacité à leur transmettre toute la matière et les notes que porte leur environnement. À condition bien sûr d’être travaillé comme il se doit. Notamment, en termes de rendements : le pinot noir ne supporte pas les cultures intensives.

Et quid du pinot noir en dehors de sa région de prédilection ?

Nulle part ailleurs, vous ne retrouverez une telle symbiose entre un cépage et son environnement. C’est unique. Pour autant, des vignerons de tous horizons ont tenté leur chance. D’où sa présence aujourd’hui dans le Jura, en Alsace, dans le Sancerrois, en Champagne…, mais aussi en Suisse, en Allemagne, dans l’Italie et l’Espagne du nord, en Californie, au Chili… Reste que, de manière générale, il ne peut y bénéficier de la même attention qu’en Bourgogne. Il est à chaque fois concurrencé par d’autres cépages et des vins endémiques des lieux…

Demain, les changements climatiques ne risquent-ils pas de changer la donne ?

C’est déjà le cas ! Le pinot noir peut parfaitement s’accommoder de fortes chaleurs tant qu’il dispose de nuits fraîches. Dès lors, je vois mal comment il pourrait perdurer en Californie. L’Argentine, elle, tente de s’adapter en plantant plus haut, pour gagner en fraîcheur. Le Chili y réfléchit… La Bourgogne, elle, se frotte les mains. 

Côté dégustation, comment apprécier au mieux les vins issus de pinot noir ?

Historiquement, ils ont longtemps été associés aux viandes rouges et même au gibier, compte tenu de l’expression assez animale de ce cépage, en particulier sur de longue garde. Là encore, à mon sens, les choses changent. Aujourd’hui, les vins débouchés dans leur plus jeune âge gagnent en fraîcheur, s’ouvrent plus vite. Parfait pour accompagner des légumes, un poisson, une viande blanche…