Rencontre avec Isabelle Diacono

En novembre 2017, cette quarantenaire fonde Les Jolies Planches. Une start-up spécialisée dans l’édition de ces supports muraux d’antan. L’histoire d’une reconversion réussie…

Comment en êtes-vous arrivée là ?

J’ai longtemps travaillé dans le digital. D’abord, en téléphonie, pour anticiper les produits de demain ; puis, dans l’édition professionnelle, pour accompagner la transformation du leader mondial sur ce marché. Au bout de 25 ans, j’ai fini par me lasser. L’absence de fondamentaux visuels et pérennes, pourtant très structurants dans la transmission de nos savoirs, m’a interpellée. Et voilà comment je me suis retrouvée à plancher sur une synthèse de l’histoire de France. Un support qui permettrait à mes enfants de resituer un personnage ou un évènement dans son contexte. L’aide d’une illustratrice et le bouche-à-oreille ont fait le reste. En 2017, je disposais de ma première planche et me lançais à mon compte.

Ces planches sont donc de véritables outils ?

L’art impacte directement le cerveau. Il facilite les apprentissages. À force d’être confronté à la même belle image, chacun voit son intellect stimulé. Encore plus en situation de partage. Face à un support, les échanges participent de la mémorisation, contrairement aux portables qui isolent. Donc, oui, les planches permettent la transmission ; des connaissances bien sûr, mais, plus largement, de notre patrimoine, de nos cultures… Sans parler du fait que le beau apaise l’esprit, tout simplement.

Vos créations témoignent d’un certain engagement…

Étant aux commandes, il me paraissait essentiel de refuser tout compromis. En particulier avec mes valeurs. Mes planches sont donc réalisées en France. Leur toile de coton est durable, puisqu’elle ne s’abîme pas avec le temps ni la lumière, et leurs encres sont écologiques. Et puis, je travaille en flux tendus pour minimiser les stocks et le gaspillage.

Comment choisissez-vous vos thèmes ?

Il y a ceux qui collent à l’époque : ici, la nature avec les fruits et légumes de saison ; là, la place des femmes au gré de notre Galerie des audacieuses… D’autres sont le fruit de mes rencontres et de mon quotidien. La série des dinosaures tient à une exposition faite à Londres avec mes enfants. Comme souvent en Angleterre, le sujet y était abordé de manière chronologique, donnant à l’ensemble un éclairage simple et efficace. Nous avions adoré. J’ai donc réalisé deux planches sur la question, avant de les faire valider, comme à chaque fois, par un expert. En l’occurrence, un paléontologue du Muséum National d’Histoire Naturelle.

Et côté illustrations ?

Je me suis longtemps appuyée sur un pool d’illustrateurs. Mais cela, c’était avant mon partenariat avec la Bibliothèque Nationale de France…

Votre collaboration avec la BnF ?

Oui, nos deux maisons se sont rencontrées ! La BnF entrevoyait là l’occasion de faire vivre son fonds, et moi d’accélérer le développement de mes activités. Si une planche traditionnelle réclame 3 à 4 mois de travail, l’accès direct à de splendides illustrations, moyennant le reversement de droits bien sûr, réduit ce temps à une dizaine de jours. Au préalable, soit la BnF est à l’initiative, comme pour la planche sur les fables de Jean de La Fontaine, dont les 400 ans en 2021 appelaient un joli clin d’œil ; soit, c’est moi qui suis à la manœuvre, à l’image des cartes vintage du géographe Paul Vidal de La Blache.

Quelle est votre part de création lorsque l’illustration existe déjà ?

Mon intervention est de trois types. Premièrement, un fac-similé de l’œuvre originale, telle notre collection d’art, les Picturales. Deuxièmement, une réédition avec restauration, lorsque l’illustration choisie est abîmée. Troisièmement, une création personnelle à partir de diverses sources. Par exemple, la planche des papillons, issue de la sélection et de la composition de 80 illustrations puisées dans le catalogue du Cabinet de curiosités d’Albertus Seba.

Et demain ?

Deux nouveaux partenariats ont été signés. L’un avec l’agence photo de la Réunion des Musées Nationaux conduira à une nouvelle série de portraits. L’autre avec Arteum, le 2nd consortium de musées en France, permettra la réédition de publicités signées d’un affichiste majeur du début du XXe siècle : Leonotto Cappiello. Car, derrière chaque planche, il y a toujours l’histoire d’une personnalité méconnue qui mérite, à mon sens, d’être mise en lumière.

Retrouvez des informations complémentaires et notre sélection d’éditions des Jolies Planches ici.