Rencontre avec Aurélie Bellacicco & Sarah Lachab

Toutes deux françaises, elles vivent désormais à Édimbourg. La première en tant que photographe et styliste culinaires, la seconde comme guide pour les francophones de passage. À quatre mains, elles signent le livre de cuisine Écosseaux éditions de La Martinière. Des recettes, mais pas que…

Comment est né ce projet ?

Sarah Lachhab : En tant que guide, je ne cessais de constater la persistance de clichés sur la cuisine écossaise. « Si je viens ici, c’est plus pour apprécier les paysages que pour me régaler ! », me lançaient, en début de séjour, les francophones que j’accompagnais ; avant de terminer le plus souvent leur voyage par un « On a bien mangé finalement durant ces quelques jours. Tu n’aurais pas un livre de recettes en français à nous conseiller ? » Malheureusement, non… 

Aurélie Bellacicco : Le confinement nous a permis de nous rencontrer à l’été 2020 et, tout naturellement, d’imaginer ce livre ensemble. Un peu plus d’un an après, il était prêt !

Comment vous êtes-vous réparties le travail ?

A. B. : C’est très simple. Je me suis occupée de créer et de photographier les recettes. Sarah, elle, a fait tout le reste !

S.L. : Nous voulions que les lecteurs puissent découvrir l’Écosse au-delà de l’assiette et du verre. Le livre compte donc aussi des articles d’humeur, sur le Scottish breakfast, la place de la viande, les pubs écossais… ; ainsi que des anecdotes ponctuant les recettes. J’aime à penser qu’après avoir réalisé une préparation tirée du livre, son auteur(e) fera sienne la petite histoire jointe.

Vous avez dû adapter vos recettes au garde-manger français, non ?

A.B. : Et comment ! C’était assez comique d’ailleurs… En plein confinement, je passais une partie de mon temps au téléphone avec mes parents pour savoir si, dans l’Hexagone, tel produit pouvait se trouver ou non facilement. Il a fallu faire des choix, trouvé des alternatives. Notamment pour le saindoux que les Écossais utilisent beaucoup en cuisine. Nous lui avons préféré le beurre !

Ces adaptions traduisent également un parti pris, celui de ne pas suivre à la lettre les traditions ?

S.L. : Disons que nous souhaitions proposer une cuisine d’aujourd’hui, celle qui se mange réellement en Écosse, au quotidien. Dans cette quête, si nous avons consulté çà et là des livres datant du XIXe, notamment pour les recettes sans âge, nous nous sommes surtout inspirées des menus des pubs du pays. Au final, l’ouvrage mêle des classiques toujours d’actualité et des créations d’Aurélie.

A. B. : Cette envie de coller à l’époque nous a amenées à proposer aussi, lorsque c’était possible, une version végétarienne ou vegan de nos recettes. Cela nous tenait à cœur. Il n’y a pas que des plats de viandards ici !

Comment a évolué la cuisine écossaise à travers les âges ?

S.L. : Elle a toujours été simple, au point d’être montrée du doigt pendant des décennies. Mais, aujourd’hui, cette rusticité fait sa force. Elle témoigne d’un ancrage, d’une histoire…

A. B. : Et de la richesse d’un terroir aussi. C’est son grand retour !Désormais, les trésors locaux affichent clairement leurs origines : fraises et framboises du Fife, huîtres du loch Fyne, boudin noir de Stornoway…

S.L. : Avec eux, les circuits courts sont plébiscités. À l’image de Oink, une enseigne street food de pulled pork sandwich, doublée de sa propre ferme dans les Borders qui fournit quotidiennement à chacun de ses trois comptoirs un cochon rôti. Un délice !

Justement, quelles sont vos recettes écossaises du moment ?

A.B. : La période de Pâques appelle les hot cross buns, des sortes de petit pain au lait, plus ou moins briochés, relevés de cannelle, quatre-épices, muscade, écorce d’orange confite…

S.L. : Le cranachan aussi tombe à pic ! Souvent surnommé ici « le roi des desserts », il réunit dans une verrine une compotée de framboises fraîches et une crème fouettée à l’avoine et au whisky…